Recommandations culturelles du mois de Novembre
Tous les mois (ou presque) Weshculture vous informe de l’actualité culturelle variée de la capitale afin de mettre en avant ses meilleures découvertes !
En passant par les pièces de théâtres, les lectures, expos, films, podcasts et reportages, toute la diversité de l’actualité culturelle y passe !
L’Amour ouf : retentissement fou dès sa sortie
Film
Réalisé par Gilles Lellouche, sorti le 16 octobre
L’Amour ouf, le nouveau film de Gilles Lellouche se place d’une façon fulgurante en tête des ventes et fait grandement parler de lui. On y retrouve Adèle Exarchopoulos et François Civil dans les rôles principaux, deux acteurs dont la renommée a sûrement contribué à ce succès rapide, avec déjà plus d’un million d’entrées au box office 7 jours après sa sortie.
Cette romance suit la vie de deux jeunes, Clotaire et Jackie à différents stades de leur vie.
Alors que leurs milieux sociaux diffèrent, c’est au lycée qu’ils se rencontrent et commencent à se fréquenter. Clotaire, déscolarisé, tue le temps en commettant des petites infractions qui, un jour, lui feront prendre le mauvais chemin. Des tentations et comportements qui éloigne peu à peu le personnage de son amoureuse Jackie, les menant même à une séparation forcée. Entre violence, tristesse et mélancolie, les téléspectateurs sont témoins de l’évolution des deux personnages, variant parfois jusqu’aux extrêmes, à contresens de leurs proches et en espérant un jour se retrouver tous les deux…
La force de ce film se situe au niveau du jeu d’acteur des personnages, mais aussi du point de vue de sa réalisation, avec des compositions iconographiques puissantes.
Laurent Tanguy (à qui on doit aussi Le Grand Bain), chargé de l’image sur le film, a réalisé un travail monumental de lumière et de variété de scènes qui donne l’impression qu’aucune n’est semblable malgré la longueur du film, le rendant à la fois réaliste et touchant.
Par Simon SALAÜN, le 21/10/2024
Les belles cicatrices : un court métrage haut en couleur
Court-métrage
Raphaël Jouzeau et Pierre Le Gall
Disponible sur Youtube et Arte.Tv jusqu’au 21/03/2025
Ce court métrage d’une quinzaine de minutes nous immerge intensément dans l’histoire d’amour de Gaspard et Leïla, qui vient tout juste de prendre fin. Ils se sont donnés rendez-vous un mois après leur rupture dans un café. Les murs qui les entourent s’affaissent bien vite pour laisser place aux espaces imaginaires des lieux où ils ont côtoyé leur amour mutuel. C’est en cela que l’animation graphique prend tout son sens, permettant plus de liberté au déroulé de l'histoire. Les décors dessinés prennent la forme d’une plage déserte, d’une foule de personnes noctambule, de la ville endormie dans laquelle les deux amoureux déambulent en s’amusant. Les voix des acteurs et actrices Fanny Sidney, Quentin Dolmaire illustrent la violence émotionnelle d’une rupture amoureuse. Ils jouent à la fois des moments de complicité, des retrouvailles embarrassantes et des scènes de déchirement violentes où les cris prennent le dessus.
Le message derrière cette fiction est symbolisé en quelque sorte par la cicatrice réelle que porte Gaspard sur son visage. Elle est un marqueur du temps qu’il faut pour que se referme la plaie affective de la fin d’une histoire d’amour.
Dans une interview avec le réalisateur Raphaël Jouzeau, on apprend que les couleurs des images ont été pensées dans leur évolution en fonction des émotions des personnages. Sur la plage où ils revivent les beaux moments de leur histoire, les couleurs s’assombrissent progressivement à mesure que le soleil se couche et à mesure que les tensions apparaissent, jusqu’aux dernières paroles échangées avec tristesse. Le réalisateur avoue aussi qu’il dessinait 2 à 3 secondes par jour et qu’ainsi il leur avait fallu 3 à 4 ans pour produire l’ensemble du court-métrage à lui et son équipe.
Le film fait partie de la sélection officielle des court-métrage du festival de Cannes 2024.
Par Julie Rolland, le 21/09/2024
Nancy-Kabylie : Une histoire de mémoire
Livre
Écrit par Dorothée-Myriam Kellou et paru le 18/10/2023
Dans Nancy-Kabylie, Dorothée-Myriam Kellou entreprend une véritable enquête, de son histoire, de l’histoire de son père, mais aussi de l’histoire de l’Algérie. Dans ce livre, elle retrace son enfance, ses réflexions autour de son apprentissage de la langue arabe ainsi que sa curiosité autour de son imaginaire familial.
Enfant, elle se proclame « franco-algérienne ». Mais elle ne sait pas parler arabe et ne connaît finalement pas grand chose à la culture algérienne. « Tu es en quête ! » lui lance une amie. Une quête qui constitue le fil conducteur de son livre via une immersion dans l’histoire de l’Algérie.
Nancy-Kabylie est le récit d’un exil, celui du père de Dorothée-Myriam. Mais il est également le récit d’une introspection dans un récit familial flou. Une quête de soi qui peut se révéler difficile lorsque l’expérience individuelle est entremêlée avec l’histoire de la colonisation française en Algérie.
Au-delà de faire réfléchir le lecteur sur les questions de la nationalité ou de la langue arabe, le livre est vibrant de sincérité. Dorothée-Myriam couche ses réflexions sur papier et invite à son lecteur à se plonger dans ses pensées et de son enquête. Alors qu’elle tente de démêler la vérité de l’histoire de son village, le livre laisse transparaître le flou que provoque l’exil. Un flou qui concerne les identités de ceux qui ont vécu l’exil, mais qui est d’autant plus fort qu’il traverse les générations.
Un livre bouleversant, alternant anecdotes authentiques et témoignages pleins d’humanité, qui pose la question de la transmission de l’histoire.
Par Jeanne Ville, le 23/10/24
Gisèle Halimi, une farouche liberté : une pièce qui fait écho à l’actualité
Pièce de théâtre adaptée d’un livre
Créée en octobre 2022 au théâtre de la Scala, jusqu’au 31/05/24
“En vérité, par le viol, l’homme rappelle à la femme son malheur de naître femme et de n’être que femme”. La figure de Gisèle Halimi est connue de tous. Son combat contre la culture du viol lors du procès d’Aix en 1974 est ancré dans nos imaginaires. Mais l’origine de ses luttes, son parcours de vie, le courage qui la caractérisait le sont parfois moins.
La pièce de théâtre Gisèle Halimi, une farouche liberté dresse le portrait d’une femme qui a fait de sa vie une succession de combats pour les autres. Malgré une mise en scène sobre, le jeu des deux actrices parvient à captiver les spectateurs tout au long de la pièce. Seulement certains accessoires, qui caractérisent Gisèle Halimi, ponctuent la pièce : sa robe d’avocate ou ses carnets d’écriture par exemple.
La pièce débute par son enfance en Tunisie. Une enfance qui a fortement marqué la future avocate et féministe qu’elle deviendra, notamment par sa relation compliquée avec sa mère. Elle écrira ainsi que sa mère est “l’explication de toute (sa) démarche”, pour que “les femmes ne lui ressemblent pas”.
L’un des premiers combats de Gisèle Halimi, souvent occulté par ses fameuses plaidoiries féministes, a été celui des victimes de la colonisation française en Algérie. Dans ce cadre, elle défend Djamila Boupacha, militante du FLN, torturée et violée en détention par des soldats français. L’avocate débute alors son combat contre le viol, en en faisant un sujet public : pour la première fois, des médecins gynécologues seront convoqués en expert à un procès. Tout en retraçant sa vie, la pièce illustre également ses combats féministes, en revenant sur le procès d’Aix de 1974, son amitié avec Simone de Beauvoir, la création de Choisir la cause des femmes ou le manifeste des 343.
Au théâtre de la Scala à Paris jusqu’en mai 2025, Gisèle Halimi, une farouche liberté est une pièce qui fait écho à l’actualité. À l’heure où le procès de Mazan semble constituer une nouvelle échéance dans les avancées féministes, les procès d’Aix ou de Bobigny reviennent dans nos mémoires. Non sans les fameuses phrases et plaidoiries de Gisèle Halimi, une figure qu’il fait du bien de redécouvrir pour regagner de l’espoir dans les luttes féministes.
Par Jeanne Ville, le 23/10/24
Ni chaînes ni maîtres : une brutalité intentionnelle
Film
Réalisé par Simon Moutaïrou et sorti le 18/10/24
Sorti le 18 septembre, Ni chaînes ni maîtres est le premier film du réalisateur franco-béninois Simon Moutaïrou. Ce long métrage historique revient sur une période sombre de l’Histoire : la traite des esclaves au XVIIIe siècle. Rare sont les films traitant de cette thématique et celui-ci est d’autant plus original qu’il se place du point de vue des victimes en quête de liberté.
Se déroulant en 1759 sur l’actuelle Île Maurice, le film retrace l’histoire de Massamba, veuf, et de sa fille unique Mati, tou.e.s deux exploité.e.s dans une plantation de canne à sucre. Malgré la position privilégiée dû à sa maîtrise de la langue française, le père a un rêve pour sa fille : la rendre libre grâce à un affranchissement. Ne souhaitant plus attendre et rêvant de se délivrer de ses chaînes, Mati s'enfuit pour rejoindre une communauté cachée dans les forêts de l’île ayant pratiqué le marronnage, c’est-à-dire la fuite d’un esclave hors de la propriété de son maître.
Elle décide alors de fuir, laissant son père subir seul les conséquences de son acte. S’inquiétant pour sa fille et ne pouvant supporter son sort de torture, Massamba décide donc de fuir à son tour pour retrouver sa fille et goûter ensemble à la liberté ! Guidé par sa femme, il traverse la jungle mauricienne en quête de traces mais est poursuivi de près par les plus grand.e.s chasseurs.euses d’esclaves de l’époque. Rencontres inattendues, scènes de poursuites et de combats, le film nous transporte entre réalisme et fiction dans la vie insoutenable d’un esclave en fuite au 18e siècle.
Résultat de choix puissants et poétiques, Simon Moutaïrou réussit réellement à transmettre au spectateur les émotions des personnages historiques joués par Ibrahima Mbaye Tchie et Anna Thiandoum. Le contraste entre la brutalité de ce système colonial et esclavagiste et la beauté de l’île et de cette famille est frappant à l’image.
Par Simon SALAÜN le 07/10/24