Élections : un vote peut-il vraiment changer les choses?
La participation électorale est considérée comme le baromètre de la bonne santé d'une démocratie. Pourtant, en France, elle ne cesse de s'affaiblir depuis une vingtaine d'années.
Dimanche dernier, chez les moins de 25 ans, ce sont près de 9 électeurs sur 10 qui ne sont pas allés voter. Les jeunes mais aussi les électeurs des classes populaires se sont abstenus en masse. En tout, ce sont 2 français sur 3 qui ne se sont pas déplacés. Face à ce désaveu, la légitimité des élus est largement fragilisée et les acteurs politiques marchent à l’aveugle dans un univers largement imprévisible.
Cet état des lieux pose un certain nombre de questions : quelles sont les causes et les incidences de l'abstention ? Quelle est l’utilité du vote? L’abstention peut-elle être un mode d’expression?
Concrètement, à quoi servent les élections régionales et départementales?
Tous les six ans, les élections régionales et départementales renouvellent le paysage politique local. Des conseillers régionaux et départementaux sont élus à cette occasion.
Les départements sont principalement en charge de l’action sociale. Ils distribuent un certain nombre d'allocations et gèrent les services d’aide sociale à l’enfance. Le conseil départemental est chargé des collèges et finance aussi des musées ainsi que des actions culturelles.
Les régions sont chargées des lycées, de l'organisation des transports en commun et sont aussi compétentes pour le développement économique. Enfin, elles gèrent l’aménagement du territoire et la formation professionnelle.
Avec des prérogatives aussi concrètes, comment expliquer l’abstention massive ?
Les français, et plus particulièrement les jeunes, sont-ils vraiment désintéressés de tous ces sujets ? Les politiques, les journalistes et les experts cherchent à comprendre.
Chacun apporte un fragment d’explication : des années d’impuissance de la part des politiques, des années à aller voter sans voir de changement sur sa vie quotidienne, la configuration de l’offre politique, le traitement médiatique de l’élection, le manque d’information, la confusion ou encore la défiance seraient les causes de l’abstention.
Comment s’étonner du désintérêt des moins de 25 ans pour ces élections ? La majorité des débats ont porté sur l’insécurité alors que cette génération subit, plus que toutes les autres, les effets secondaires de la crise sanitaire et qu’elle perçoit, plus que toutes les autres, les risques d’une crise climatique dont les élus, pour la plupart, ne parviennent pas à percevoir la dimension civilisationnelle.
Il convient néanmoins de distinguer deux familles d'abstentionnistes : ceux qui ne sont pas intéressés par les élections et ceux qui refusent de voter par conviction. Bien que leurs motivations soient différentes, ils pensent que le vote est inutile.
Ajoutons à cela ceux qui butent sur les procédures d'inscriptions : de nombreux étudiants n’étudient pas dans la ville où ils sont inscrits. Nous obtenons un nombre massif d’électeurs qui n’iront pas voter.
Pourtant, il serait faux d'affirmer que les jeunes ne s'engagent plus.
L'engagement s’est simplement déporté. En 2020, près d’un jeune sur deux a déjà signé une pétition ou défendu une cause sur internet. L’engagement bénévole est aussi très important : 40% des 18-30 ans sont impliqués dans une cause humanitaire ou politique. La citoyenneté s’exprime ailleurs. On manifeste, on boycotte, on partage.
Il est plus facile aujourd'hui de protester et de se positionner contre que d'adhérer à un système ou à une ligne politique. Et dans l'utilisation de ces formes d'expression protestataire, l'abstention occupe une place importante.
On manifeste, on boycotte, on partage. Il est plus facile aujourd'hui de protester et de se positionner contre que d'adhérer à un système ou à une ligne politique. Et dans l'utilisation de ces formes d'expression protestataire, l'abstention occupe une place importante.
Alors comment ramener les Français au vote ?
Il existe deux principaux leviers d’action: modifier les modalités du scrutin ou modifier les institutions. Prendre en compte le vote blanc et instaurer le vote obligatoire comme en Belgique ? Voter directement sur ses appareils électroniques ? Communiquer davantage sur les enjeux des élections et simplifier les procédures d’inscriptions ? Créer de nouveaux modes de fonctionnement politique tel que la démocratie directe ou le mandat impératif ? Le débat est ouvert.
Tout notre système peut être questionné et remis en perspective mais en attendant un sursaut démocratique, notre principal outil d’expression reste le vote.
Carlotta, rédactrice en chef de weshculture.